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samedi 7 juin 2014

Onze moments mythiques de la Coupe du Monde - 9 : Portugal - Pays-Bas 2006

Cet article fait partie d'une série de onze textes consacés à autant de moments mythiques offerts par la Coupe du Monde de football depuis 1998. Retrouvez les autres sur cette page.


Règlement de compte à OK Corral.

Il arrive que certains matches laissent une empreinte indélébile. Pour leur scénario à suspense (la finale de Ligue des Champions entre Liverpool et le Milan AC en 2005 ou celle de l’Euro 2000 entre la France et l’Italie), pour la qualité du jeu produit (le quart de finale entre les Pays-Bas et la Russie, en 2008), pour un arbitrage scandaleux (Chelsea - Barcelone en 2009) pour un geste entré dans l’Histoire (la reprise de volée de Van Basten en 88 contre l’URSS) ou pour une forte résonnance politique (Etats-Unis – Iran au mondial 98).

D’autres le restent car ce sont des purges ou des pugilats. Le huitième de finale disputé par le Portugal et les Pays-Bas lors de la Coupe du Monde 2006 en est peut-être l’exemple le plus vibrant. Rien ne laissait présager un tel déchaînement : les Pays-Bas étaient entraînés par Marco Van Basten, apôtre du beau jeu et symbole de l’élégance lorsqu’il était joueur, et le Portugal, équipe réputée joueuse et dotée de manieurs de ballon comme Figo, Maniche, Deco ou le jeune Cristiano Ronaldo, alors âgé de 21 ans et affublé du numéro 17.

Le joueur de Manchester United est décidé à sortir le grand jeu, et commence dès le début du match à jauger ses adversaires en essayant de les dribbler (à l’époque, celui qui n’est pas encore devenu CR7 n’est pas non plus la machine à marquer qu’il est devenu par la suite, mais un ailier rapide et dribbleur, volontiers « grigriteur »). Sauf qu’en face, c’est Mark van Bommel, qui n’est pas du genre à se laisser marcher sur les pieds. Dès la deuxième minute, il le découpe le long de la ligne de touche, proprement. L’arbitre, monsieur Ivanov, siffle immédiatement. Carton jaune, le premier d’une interminable série.

Un match qui cartonne.
Dans l’indifférence la plus totale, ou presque, Maniche marque le seul but du match. L’important est ailleurs : c’est le concours du plus grand nombre de biscottes. Le genre de match où, à la mi-temps, les entraîneurs disent à leurs joueurs que celui qui n’a pas son carton à la fin du match est un traître. Et avec les poètes présents sur le terrain (Van Bommel, Heitinga, Boulahrouz, Van Bronkhorst ou Sneijder côté hollandais, Petit, Costinha, Figo, Maniche ou Nuno Valente pour le Portugal), le résultat est au-delà de toute espérance : seize jaunes distribués, pour quatre rouges, et là encore, une victoire des Portugais, par 9 avertissements à 7, avec deux expulsions partout. Mais au-delà de ce total record en Coupe du Monde (loin devant Allemagne - Cameroun 2002 et Espagne – Pays-Bas 2010), c’est l’impression d’avoir assisté à un combat de rue qui prédomine.

Le Portugais Costinha est le premier à être expulsé, juste avant la mi-temps, coupable d’une stupide main volontaire commise sous le coup de l’énervement. En seconde période, une échauffourée voit Figo mettre un coup de boule à Van Bommel en ne s’en tirant qu’avec un jaune, avant de réussir à faire expulser Boulharouz dès l’action suivante. Un peu plus tard, Heitinga refuse de rendre la balle aux Portugais après un arrêt de jeu et part dans une série de dribble. Deco le sèche, et débute une nouvelle altercation entre joueurs des deux équipes, durant laquelle Sneijder se jette sur Petit et n’écope lui aussi que d’un jaune. Un peu plus tard, Cocu poussera Deco par terre sans même être sanctionné. Van Persie adresse un grand bras d’honneur à la défense Portugaise. Ce n’est plus du football, c’est un carnage – la plupart des fautes sont gratuites, méchantes, faites pour intimider, et toutes ne sont pas accompagnées d’un carton tandis que la pression monte constamment entre les deux bancs de touches. Jusqu’où iront-ils ? Dans les tribunes, le public, chauffé à blanc, se le demande, tant l’accumulation de coups de sifflets de l’arbitre devient enivrante et le spectacle des multiples bassesses des uns et des autres jubilatoire.

La paix des braves.
La conclusion est inattendue. Lors des arrêts de jeu, les caméras capturent une image insolite : le Portugais Deco et le Néerlandais Van Bronkhorst, tous deux expulsés, s’asseyent côte à côte au bord du terrain et regardent la fin de la rencontre en discutant, piteux comme deux collégiens qui sortent du bureau du principal. L’un porte un maillot grenat, l’autre blanc. Les deux sont amis et partenaires de club, au Barça où ils viennent de remporter la Ligue des Champions. Mieux, même : petits, bruns et coiffés pareil, ils se ressemblent. Et durant quatre-vingt-dix minutes, ils viennent de s’affronter, sur le pré comme sur un ring. Tout le monde a oublié que le Portugal avait gagné cette rencontre. Personne, en revanche, de fera disparaître le souvenir de sa sauvagerie.

Tous les cartons :