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jeudi 11 décembre 2014

L'année 2014 en affiches

2014 se termine. Quels ont été les meilleurs films politiques de l'année ? Réponse avec un petit top 5.


5ème : Dent pour dent...





Comédie romantique trash, qui emprunte autant à Feydeau qu'à Mr & Mrs Smith, centré sur le destin d'un homme, séducteur malgré lui, autour duquel plusieurs femmes se déchirent. Portés par des comédiens époustouflants (mention spéciale à Ségolène Royal, formidable en ex devenue bonne copine), et des dialogues qui font mouche à chaque fois (la réplique du héros sur l'absence de dents de certains pauvres qui donne son titre au film est immédiatement devenue culte), Dent pour dent... réinvente la screwball comedy en lui donnant un doux parfum de jeu de massacre. Incontournable.



4ème : Jeux de mains




Porté par un scénario ultra acclamé, Jeux de mains combine astucieusement le film de mafia façon Parrain, le film d'arnaque à la Ocean's eleven et la série B versant revenge movie (Old Boy, Kill Bill). Porté par une distribution éclatante et des secondes rôles tous plus truculents les uns que les autres (on citera Jérôme Lavrilleux et Bruno Le Maire, deux révélations dont on entendra certainement beaucoup parler ces prochaines années), Jeux de mains impressionne. Le succès a été tel qu'une suite est déjà annoncée pour 2015, sous le titre sans surprise de Jeux de vilains. On a hâte de voir ça, même si Jean-François Copé a déjà annoncé qu'il ne serait pas de la partie.



3ème : Gencive World




La comédie familiale à la française était moribonde ces dernières années, à tel point que l'on a cru le genre mort et enterré. Et Gencive World est arrivé. Ne pas se fier à son titre façon ciné indé américain, on a là affaire à un pur produit du terroir, bien de chez nous, français de souche. L'originalité du scénario est de miser sur les particularités physique des acteurs, tous issus de la même famille (les Le Pen, d'ordinaire abonnés aux rôles de méchants). Entre répliques provocatrices (la tirade dite de la fournée) ou moments de pur burlesque (cette scène mémorable où le doberman du grand-père dévore le chat de la tante), l'inventivité est constante, pour notre plus grand plaisir.



2ème : Seul et mouillé



Beaucoup de termes ont été évoqués pour tenter de définir le genre cinématographique auquel Seul et mouillé pourrait appartenir, et parmi eux, celui de road movie statique retient notre attention. Comment décrire autrement la prouesse narrative d'un film à ce point immobile et passionnant, tourné entièrement en décors naturels et dans des conditions climatiques parfois dantesques ? Le talent de l'interprête principal, dans son énième rôle de type dépassé par les évènements mais qui reste stoïque, éclate une nouvelle fois et permet de totalement occulter l'absence de scénario. A voir et à revoir.



1er : Le Double



Les thrillers schizophréno-paranoïaques ont la côte, ces temps-ci, et Le Double en offre un nouvel exemple. Qui est qui ? Un homme peut-il posséder plusieurs incarnations ? A moins qu'il ne s'agisse que d'un seul corps, aux identités multiples ? A chaque plan de ce Double très librement inspiré de Dostoïevski, le vertige croît. Paul Bismuth, totalement inconnu avant ce film, est une révélation marquante : outre sa facilité à passer d'un personnage à l'autre, on retiendra chez lui un don pour le trouble, pour l'ambiguïté. On ne dira rien du dénouement bluffant de ce petit chef d'oeuvre, ni des multiples rebondissements qui le précèdent. Un mot, un seul : magistral.


jeudi 29 mai 2014

La lettre C

Les mains en l'air, monsieur Copé, vous êtes cerné.


La langue française n’utilise pas, ou presque, la lettre K, onzième lettre de l’alphabet – c’est d’ailleurs là un trait partagé parmi les langues romanes. Le K est principalement dévolu aux mots d’origines étrangères, aux emprunts de notre langue au japonais (pour le karaté), au maori (pour le kiwi), à l’anglais (pour le kart) ou au danois (pour le kayak). Pour le reste, pour notre héritage latin, nous avons, pour retranscrire le phonème [k], le choix entre le Q et le C. Il y aurait beaucoup à écrire sur l’inutilité du Q, consonne compliquée qu’il est généralement impossible d’utiliser sans la faire suivre d’un U, et qui, de fait, ne se retrouve employé que dans quelques mots caricaturaux. Le C, lui, est un autre cas problématique : un coup il se prononce [s], un coup il se prononce [k], en fonction de la voyelle qui le suit – il peut même être orné d’une cédille (et ressembler à Ça) pour contrevenir aux règles précédemment évoquées. C’est pourtant lui que la langue française (à l’instar de l’italienne ou de la portugaise) a chargé de représenter à 95% la prononciation de ce fameux phonème [k].

Car il faut bien se l’avouer, le K a plus de gueule. Son nom, déjà, K (prononcer « ka »), a davantage de caractère que le pauvre C (« sé »). Sa physionomie, ensuite, ces barres qui partent dans tous les sens, tout ça lui assure un charisme évident, que le C, hélas, est loin de partager. C’est l’un des regrets que j’ai vis-à-vis de ma langue maternelle : qu’elle n’ait pas su incorporer plus efficacement le K, lettre jouissive à tracer – pas autant, certes, que le Z plus gâté par la deuxième personne du pluriel.

Ainsi, alors que les Etats-Unis, pays de langue anglaise et donc beaucoup moins complexés que nous dans l’usage du K, alors donc qu’ils ont eu JFK, nous, en France, nous avons eu JFC.

JFK, le vrai


JFK, c’est bien sûr John Fitzgerald Kennedy, trente-cinquième président des Etats-Unis (premier catholique à accéder à cette fonction), mort assassiné à Dallas, icône américaine au point que le principal aéroport de New York porte son nom, ainsi que deux porte-avions ou le théâtre de Washington.

JFC, c’est Jean-François Copé, homme politique français des années 2000 et 2010 à propos duquel il devient chaque jour un peu plus certain qu'il ne montera jamais plus haut que Ministre du Budget (fonction occupée de 2004 à 2007), ce qui est particulièrement tragique si l’on considère que, davantage qu’aucun autre homme politique en France, Copé avait clamé son désir de devenir un jour Président de la République. Personne, parmi les ambitieux de sa génération (Valls, NKM, Montebourg ou Xavier Bertrand), ne s’est épanché sur le sujet avec autant d’ardeur, ni si fréquemment, et même Nicolas Sarkozy, en son temps, avait été plus évasif. Copé, lui, affiche son ambition depuis des années et des années – depuis près de dix ans, en fait. Et la vie, souvent, est capricieuse : elle adore punir ceux qui ont ouvert trop grand leurs gueules, pour parler trivialement.

Aujourd’hui, Copé est sur le point de quitter ses fonctions à la tête de l’UMP, fonctions qu'il avait usurpées à François Fillon après le scrutin vraisemblablement truqué de novembre 2012. Alors qu’il était déjà depuis longtemps l'homme politique le moins apprécié des Français, le coup porté par l’affaire Bygmalion risque de l’abattre pour de bon : même le plus fervent militant du parti ne pourra pas empêcher une hésitation au moment de glisser dans l’urne un bulletin au nom de Jean-François Copé. C’est ce qu’on appelle être grillé.

L'homme a commis deux erreurs : la première, c’est de s’être cru plus malin que tout le monde ; la seconde, c’est de s’être fait des ennemis jurés. Au premier rang de ceux-ci, François Fillon, qui n’a toujours pas digéré l’élection volée de 2012 et qui vient d’obtenir sa vengeance, avec l’éviction de Copé. A la tête de l’UMP, désormais, on retrouve un triumvirat composé de Fillon, donc, ainsi que d’Alain Juppé et de Jean-Pierre Raffarin. On ne pouvait pas rêver mieux pour barrer la route à un retour de Sarkozy.

Les Dalton


Parce que derrière le fusible Copé, c’est bien l’ancien président qui se retrouve en ligne de mire. Il avait réussi à placer Copé à la tête du parti, c’est-à-dire à qu’il continuait, en sous-main, à piloter l’UMP, Copé étant le seul des barons à leur avoir publiquement déclaré allégeance. Désormais, il doit composer avec Fillon, qui ne cache pas son envie d’en découdre avec celui dont il fut premier ministre, Juppé, qui veut se poser en recours, et Raffarin, qui, s’il n’a sans doute pas d’ambition présidentielle, fut quand même l’un des premiers, parmi les ténors du parti de droite, à prendre ses distances avec le tournant droitier la campagne de 2012. Aucun des trois ne souhaite un retour aux affaires de Sarkozy, et à constater l’absence de pitié dont ils ont fait preuve en sacrifiant Copé, il ne fait aucun doute qu’ils se montreront aussi intraitables vis-à-vis de leur ancien patron, déjà cerné par les affaires judiciaires (affaire Tapie, affaire Karachi, affaire Buisson, affaire Kadhafi, affaire Bygmalion, affaire Bettencourt, affaire des sondages de l'Elysée…).

Copé se rêvait JFK et ne fut que JFC, sigle qu'il partage avec le Jurançon Football Club, qui, sans lui manquer de respect, n'est pas le Real Madrid, ni même l'US Quevilly. Il est fort probable que sa carrière politique soit terminée, loins des ors qu'il convoitait tout haut. La faute à la lettre C.