(Chris Columbus, 2015)
Avec ses 88 millions de dollars de budget de production, Pixels ne pouvait pas échapper à la
moulinette du Blockbusteromètre. L’occasion de voir ce que vaut vraiment l’association
d’Adam Sandler, Peter Dinklage et Pac-Man.
Au bout d'une heure de film, ce genre d'image ne surprend plus personne. |
1 : Originalité nanarde du pitch : 10/10
Le moins qu’on puisse dire, c’est
que Pixels tape très, très fort.
Jugez plutôt : suite à un quiproquo né de l'envoi dans l'espace, en 1982, d'une cassette vidéo, des extraterrestres ayant pris l’apparence de créatures de
jeux d'arcade des années 80 décident d’attaquer la terre. Pour faire face à la
menace, le président des Etats-Unis, ancien ringard de première, décide de demander
les services de son meilleur ami d’enfance, un ado attardé devenu réparateur de
matériel hi-fi et toujours passionné par les jeux vidéo de sa jeunesse. Qui dit mieux ?
2 : Efficacité du placement de produits : 10/10
Les producteurs du film auraient décidé de
faire une publicité d’une heure quarante pour Nintendo qu’ils ne s’y seraient
pas mieux pris. Donkey Kong est ainsi, selon le terme consacré, le boss de fin du film. Mais les autres
développeurs mythiques de jeu vidéo que sont Sega ou Namco sont également
cités au travers de jeux aussi mythiques que Pac-man (dont le créateur apparaît même à l'écran le temps d'une courte scène) ou Space Invaders. Ce qui
n’est pas un mince exploit, sachant que le film est produit par Sony, autre
géant du jeu vidéo (à qui l’on doit notamment la console Playstation) qui s’est
récemment diversifié en se mettant également au cinéma.
3 : Quotient pyrotechnique : 8/10
Ne faisons pas la fine bouche : non
seulement Pixels envoie pas mal d’adrénaline,
mais en plus, loin d’être répétitif en terme d’action, il effectue différentes
figures. On a ainsi droit aux scènes basiques mais ô combien attendues que sont
les fusillades avec des armes du futur, les poursuites en voiture ou les destructions de monuments connus, mais
également à un vrai moment de bravoure que constitue la séquence finale où les
héros disputent une partie de Donkey Kong
grandeur nature. Loin d’être un frein, l’esthétique pleine de pixels des
effets spéciaux ajoute de l’étrangeté à ces passages obligés. La 3D, en
revanche, apparaît comme totalement inutile.
Pour affronter les extraterrestres, cette fois-ci, on n'a pas droit à l'armée américaine, mais à une armée mexicaine. |
4 : Taux d’américano-centrisme : 6/10
Le ton est donné dès le début :
l’un des personnages principaux du film est président des Etats-Unis. En conséquence, tous
les héros sont américains, et pour sauver la planète, il ne sera pas question
de compter sur les Russes ou les Chinois, pas même évoqués. Non, l’Amérique
doit assumer seule le devenir de la Terre. Mais hélas, le film s’autorise deux
incursions à l’étranger, et malgré les efforts déployés rayon clichés (l’Inde réduite au Taj
Mahal et à la naïveté enfantine d’une demande en mariage, l’Angleterre où tout
le monde parle d’une façon hyperdatée), échoue dans sa tentative de réduire le
monde au seul pays de l’oncle Sam.
5 : Charisme du méchant : 2/10
Le parti pris du film est de ne
pas montrer les extraterrestres sous leur forme d’origine mais seulement sous
leurs incarnations que sont les personnages de jeux vidéo se confrontant aux
héros et quelques emblèmes des années 80 figurant sur la cassette envoyée dans
l’espace (Reagan, JR de Dallas, Madonna). Pas d’antagoniste mémorable dont la
simple pensée empêche de fermer l’œil la nuit, donc, malgré les efforts
déployés par ce brave Donkey Kong. Cela aurait pu valoir un 3/10, mais le film
perd un point supplémentaire puisqu’il emploie Sean Bean, vieux routard des
rôles de méchants à Hollywood, dans un emploi de personnage bourru mais
finalement gentil – et, double crime de lèse-majesté, qu’il ne le tue même pas
à la fin, contrairement à la coutume.
6 : Coefficient d’incongruité scénaristique : 4/10
Une fois le postulat de base du
film accepté, plus rien n’étonne. Dans ces conditions, pas difficile d’accepter
que la mère célibataire visitée par Adam Sandler au début du film s’avère l’une
des plus proches conseillères militaires de son pote président. Pas difficile
non plus de tolérer que les seuls experts des jeux vidéo consultés par le
président soient les ringards avec qui il a passé son adolescence. Pire :
ces énormes ficelles (et un certain nombre d'autres) passent complètement inaperçues.
S'aimer, c'est regarder ensemble dans la même direction. |
7 : Respect du quota de bimbos : 8/10
Avec ses héros losers et tous
plus ou moins bedonnants, pas évident pour le film de réveiller la libido de
ses spectateurs entre deux parties de Pac
Man de l’espace. Heureusement, Pixels
a la bonne idée de ramener sur le devant de la scène Michelle Monaghan,
comédienne au physique atypique, vue notamment dans Kiss Kiss Bang Bang, le troisième volet de Mission Impossible ou encore dans la série True Detective, pour servir d’atout charme au film. Et au cas où ça
ne suffit pas, le film voit l’irruption totalement gratuite d’Ashley Benson
dans un rôle d’alien ayant pris l’apparence d’une incarnation de l’héroïne de
jeu Lady Lisa. Sans parler de l’apparition surprise de Serena Williams, dans
son propre rôle.
8 : Potentiel auteurisant : 5/10
Se pencher sur la filmographie du
réalisateur Chris Columbus, c’est être confronté à une liste de navets
tellement longue qu’elle en devient presque une litanie - très étonnant, du coup, de le retrouver aux manettes (c'est le cas de le dire) d'une réussite telle que Pixels. Mais il y a bien une
constante : son goût pour l’enfance, qu’il avait exprimé très tôt en
réalisant Maman j’ai raté l’avion et
dont les deux premiers opus de la saga Harry
Potter avaient marqué l’apogée. Ici, les personnages sont adultes, certes,
mais ont conservé en eux une immaturité totale qui en fait les dignes héritiers
des héros des précédents films de Columbus.
9 : Cultitude des répliques : 8/10
On rit beaucoup, dans Pixels, tant le film semble ne jamais se
prendre vraiment au sérieux. Servis par des acteurs ayant quelques beaux faits
d’armes dans la comédie, tel Adam Sandler (Funny
people, Rien que pour vos cheveux,
Punch drunk love) ou Kevin James (Hitch, expert en séduction) et par l’une
des plus grandes stars du moment, le génial Peter Dinklage (Tyrion Lannister
dans Game of thrones), les dialogues
font souvent mouche. Une réplique, véritable petit bijou, mérite
particulièrement d’être retenue tant elle symbolise à elle-seule 25 ans d’Internet,
de complotisme et de culture geek :
« J’ai revu les images de son
assassinat, c’est Kennedy qui a tiré le premier. »
10 : Capacité de mutation en franchise : 3/10
Un Pixels 2 ? Sur le papier, pourquoi pas, tant ce premier opus
est divertissant et tant il y a matière à piocher dans les catalogues de jeux
vidéo des premières années (après les eighties
dans ce film, on pourrait imaginer retrouver quelques grandes figures de la
décennie suivante dans la suite, comme Lara Croft ou Mario). Mais il y a un
bémol majeur : le flop magistral du film au box-office. Avec des résultats
si décevants en termes d’entrées, aucun producteur ne voudra financer une suite.
Ne soyons cependant pas trop pessimiste : dans 15 ans, au gré des rediffusions
et des locations, Pixels aura
peut-être gagné ses galons de film culte. Et là, tout redeviendra possible.
Score pop-corn global : 64/100
Très bon total pour ce film qui
offre à peu près tout ce qu’un blockbuster peut offrir à ses spectateurs. Ne
pas hésiter à prendre du pop-corn en quantité importante, on en a envie d’un
bout à l’autre, mais attention : le versant comique du film peut provoquer
des éclats de rires impromptus, qui sont autant d’occasions de s’étrangler avec
un grain de maïs. Prévoir donc une boisson pour faciliter le mécanisme de
déglutition, de préférence non-gazeuse (un Ice tea semble parfaitement indiqué).
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